©Alexis Courcoux
Après trois années passées sur le circuit Figaro, Violette Dorange, s’engage sur un projet Vendée Globe 2024, avec comme bateau l’IMOCA nommé « Hubert » de Jean Le Cam, skipper ayant terminé 4e du Vendée Globe 2020. La jeune femme de 21 ans s’apprête à convoyer son bateau des Antilles, au retour de la Route du Rhum – Destination Guadeloupe disputée par le skipper Éric Bellion. Elle revient sur son expérience sur le circuit Figaro avec en point d’orgue, sa transatlantique disputée en double avec Alan Roberts, terminée en 9e position, à moins de 4 heures des vainqueurs Nils Palmieri et Julien Villon.
Le circuit Figaro est réputé pour être parmi les plus durs. Qu’as-tu appris durant ces trois ans ?
Ce circuit m’a permis de devenir professionnelle. Avant ça, j’avais fait la Mini Transat, c’était pour moi la découverte du large. Sur le circuit Figaro, il y a un sacré niveau, la concurrence est sérieuse ! Le fait d’être sur un support monotype, c'est-à-dire que tout le monde a exactement le même bateau, c’est hyper intéressant. J’ai énormément appris pendant ces trois ans, en stratégie, en gestion du sommeil, en gestion de la vie à bord… D’autant que sur ce circuit, les formats sont souvent assez courts et difficiles. Le Figaro Bénéteau 3 est un bateau super intéressant, à la fois dur et en même temps “maîtrisable”. J’ai adoré ce circuit, c’est vraiment très formateur.
Tu as disputé plusieurs courses en double mixte sur ce circuit, et notamment la transatlantique avec Alan Roberts. Peux-tu nous raconter comment cela s’est passé ?
Quand tu navigues en double, le choix du co-skipper est très important. Il ne faut pas se faire écraser, il faut choisir quelqu’un d’ouvert, qui est dans le partage. Je voulais embarquer quelqu’un qui m’apportent des choses, qui m’aide à améliorer ma performance. J’ai toujours choisi des skippers plus expérimentés pour naviguer avec moi sur mon bateau. Je faisais attention à choisir un profil qui me correspondait bien. Ça s’est toujours bien passé, avec Alan ou avec Julien Pulvé ou Erwan Tabarly. Il y avait une bonne communication à bord et à terre tout se passait bien. Comme c’était mon projet, c’était sans doute plus facile d’avoir ma place. J’ai adoré ces courses en double, à chaque fois j’en suis ressortie grandie. Je pense qu’un homme et une femme sont très complémentaires et sur un bateau, on le voit bien. Dans les décisions stratégiques, dans le mode de vie à bord, ça fonctionne bien !
Est-ce une force alors, de naviguer en double mixte ?
Je pense que le plus important avec son co-skipper, c’est qu’il y ait une bonne communication, en mixte ou pas en mixte ! Il faut qu’il y ait une bonne synchro entre les deux marins. J’ai fait aussi du double pendant mes années de voile légère, en 420 avec une fille et c’était la même chose. Le plus important, c’est la cohésion du binôme, le genre de la personne importe peu finalement.
Appréhendais-tu la mixité à bord pour une course aussi longue qu’une traversée de l'Atlantique ?
C’est sûr qu’un Figaro c’est un petit bateau, alors forcément à bord il n’y a pas de douche, pas de cabine, pas de toilettes ! Mais ce sont des choses que l’on avait préparé avec Alan. Avant de partir, on avait vraiment pris du temps pour discuter et se poser toutes les questions. Des questions en lien avec le bateau, des questions techniques, des questions de sécurité… Et on s’était aussi posé certaines questions liées à la vie à bord. Par exemple, je lui avais dit que lorsque je me changeais, je ne voulais pas qu’il rentre dans le bateau à ce moment-là. On avait posé toutes les limites, on est parti en mer sans qu’il n’y ait aucun tabou. Donc il n’y avait pas de gêne, pas de problème. Tout cela est une question de respect et de communication.
Que penses-tu du fait que la mixité soit imposée dorénavant ?
Je comprends que certaines personnes qui souhaitaient la faire avec quelqu’un du même sexe puissent être déçues. Après, je pense que ça a du bon de passer par là. Je pense qu’il y a encore plein de femmes qui aimeraient faire de la voile en course au large mais qui n’osent pas. Parce qu’elles se disent que ce milieu n’est pas fait pour elles, mais aussi parfois parce qu’on ne leur laisse pas leur chance. Je pense qu’on va découvrir plein de profils et on va se rendre compte que les filles ne sont pas ridicules quand elles sont en mer ! J’espère juste que l’on ne va pas être obligé de l’imposer tout le temps, qu’un jour les choses changeront et que les filles se lanceront plus facilement à monter leur propre projet.
Quel est ton plus beau et ton pire souvenir sur cette transatlantique en Figaro ?
Je me souviens du passage des Canaries, c’était assez dingue. Le vent montait hyper fort d’un coup. Avec Alan on s’était très bien préparés, on avait commencé à mettre des ris dans la grand-voile et dans le J2, on était prêts à affaler. Tout s’est trop bien passé, on était à fond tous les deux ! On est passés super proches des côtes, c’était vraiment beau.
Et puis évidemment l’arrivée à Saint-Barth ! L’ambiance là-bas, c’était quelque chose de dingue. C’était vraiment un moment magique. D’autant que l’on quittait Concarneau dans un contexte où le covid était encore bien présent, et là bas c’était la fête !
Et mon pire souvenir… Le départ ! On vole le départ, il y a un rappel individuel. On est parti avec quasiment 20 min de retard sur tout le monde. On a passé tout le début de course à tenter de rattraper ce retard.
Ton programme IMCOA est bien chargé. Malgré tout, existe-t-il une possibilité que tu participes à l’édition 2023 de la Transat Paprec ?
C’est une possibilité. En tout cas, je garde une petite option dans un coin de ma tête si l'occasion se présente. J’ai adoré en 2021, ça fait partie des plus belles courses que j’ai faites en Figaro.